Avec la coopérative Medispring, un groupe de médecins reprend son destin en main et se réapproprie son outil de travail. 

Un marché instable

Depuis plusieurs années, l’industrie du logiciel médical s’est renforcée. Les fusions-acquisitions entre éditeurs de solutions informatiques se sont faites de plus en plus fréquentes. En février 2018, plus de 1200 médecins apprennent que leur logiciel informatique, Epicure, est racheté par un concurrent. Le plan de ce dernier est simple : imposer sa propre solution informatique à ces médecins et retirer Epicure du marché !

« Il faut savoir que pour un médecin, s’approprier un tel logiciel, c’est un investissement en temps et une source de stress dans le transfert des données », nous expliquent Alain-François Bleeckx et Pierre Masscheleyn, deux des médecins fondateurs de Medispring. « Épicure nous convenait parfaitement, nous avions un confrère comme contact qui comprenait nos besoins et adaptait le logiciel en fonction de ceux-ci. On nous a, du jour au lendemain, confisqué notre outil de travail. »

Medispring : une réponse aux besoins des médecins

Quelques mois après l’annonce du rachat, grâce à une forte mobilisation entre confrères, un groupe de médecins créée la coopérative Medispring. Elle développe un logiciel fait par les médecins, pour les médecins.

« Actuellement, nous visons les médecins généralistes mais nous voulons aussi proposer une version pour les spécialistes et tous les prestataires de soins (infirmiers, podologues, kinés, diététiciens…) et chaque fois, nous voulons les impliquer dans la coopérative pour que ce soit leur outil ! ». « Nous ne visons pas le profit à tout prix. Nous voulons être à l’équilibre financier mais surtout, nous voulons un logiciel qui nous convient et dont nous resterons propriétaires. »  

La coopérative : une garantie pour la pérennité  

« Une coopérative s’imposait comme le modèle idéal », indique Pierre, « tous les partenaires sont sur le même pied, c’est quasiment impossible de racheter l’entreprise car elle appartient à la collectivité. C’est une vraie garantie de pérennité. »

Une forte mobilisation

« Entre la troisième semaine et la sixième semaine après l’annonce du rachat, nous sommes passés de 40 à 100 médecins connectés au projet. 62 ont pris une participation financière dans la coopérative ».

« A partir de là, tout s’est accéléré. Nous avons pu finaliser un plan financier et commencer les développements informatiques. Nous avons deux équipes de développeurs, soit douze informaticiens qui vont nous accompagner pendant 2 ans. Nous sommes également épaulés par Isabelle Polis. Elle connait très bien le milieu médical et le domaine de l’e-santé. Son aide est essentielle. » explique Alain-François.

« En juin 2018, nous avons organisé une grande réunion à Namur. Nous avons présenté notre projet à près de 400 médecins. Avant cette réunion, nous comptions déjà 100 médecins qui avaient pris une part. Fin août 2018, nous étions plus de 450 coopérateurs. »

Ce financement est une des caractéristiques de l’entrepreneuriat coopératif. Les médecins coopérateurs qui croient dans le projet seront les premiers utilisateurs, les meilleurs ambassadeurs et surtout, la meilleure garantie du sérieux du projet. Boucler un financement dans ces conditions est beaucoup plus facile !

Leurs trois arguments pour une coopérative

  1. Garantir la pérennité du projet : la revente doit être acceptée par la majorité des coopérateurs pour pouvoir se faire
  2. Privilégier le service aux utilisateurs plutôt que le paiement de dividendes aux actionnaires
  3. Fédérer et mobiliser : Les médecins-coopérateurs peuvent prendre un rôle actif et s’approprier leur outil de travail